(Hôpital Bichat)
Je ne pensais pas parler de mon métier sur ce blog. Ce site devait rester une parenthèse pour parler de mes passions principales : les affaires européennes et la culture. Oui, mais voilà, l’actualité a mis tout particulièrement mon institution sur le devant de la scène.
En effet, depuis le 2 janvier 2020, je suis devenu directeur d’hôpital, et plus particulièrement Directeur des ressources humaines à l’hôpital Bichat. L’un des 39 établissements de l’Assistance Publique – Hôpitaux de Paris (AP-HP), l’un des 3 établissements santé de référence sur les maladies infectieuses en Ile-de-France, avec les hôpitaux de La Pitié Salpétrière et Necker-Enfants malades.
Si une prise de poste est souvent chargée, le temps de découvrir l’institution dans laquelle on débarque, celle-ci sera par bien des aspects inédites.
Un petit témoignage en guise de premier bilan, alors que s’ouvre le Ségur de la santé et avec lui, les nombreux chantiers pour mettre en place l’hôpital de demain.
Au cours de ces dernières semaines, le quotidien des hospitaliers a été envahi par le coronavirus. De cellules de crise en réunions d’information, du rappel des personnels à la gestion de dernière minute pour trouver des places d’écoles pour les soignants, de réorganisations des services aux ouvertures de lits de réanimation, la prise en charge des patients COVID a pris de l’ampleur au sein des établissements de santé.
L’ensemble des services de soins et des directions administratives se sont mis en ordre de bataille face au COVID19. A ce niveau-là et à ce rythme-ci, ce n’est plus un bouleversement, c’est une révolution. L’hôpital Bichat d’aujourd’hui ne ressemble plus par bien des aspects à celui du début d’année.
L’Hôpital dont on se plaît tous souvent à moquer ses lenteurs, ses procédures interminables, son processus de décision erratique, s’est transformé en une machine agile, capable de s’adapter plusieurs fois en une semaine, fermant des services en 48 heures, en réunissant d’autres en 24 heures, doublant sa capacité de réanimation en moins d’un mois, le tout en continuant à assurer ses missions de recours et d’urgence pour les patients non-COVID qui continuent à avoir besoin de l’hôpital public. Tout ceci grâce au travail et à la solidarité d’un personnel qui remplit la mission première d’un établissement de santé (assurer le soin), mais aussi grâce à la réactivité des cadres de santé, ces chevilles ouvrières qu’on oublie trop souvent qui assurent le lien et l’organisation au sein des services.
Tous ces professionnels accomplissent au quotidien des merveilles. Car si les miracles sont pour Dieu, les merveilles sont pour les hommes.
Et toutes ces décisions qui se traduisent rapidement en actes ne sont pas le résultat d’une construction arbitraire mais bien d’un arbitrage collégial réalisé par des représentants de la direction et des médecins, aidés par des soignants et des médecins directement en lien avec la prise en charge COVID. Un processus collectif, en lien avec les autres hôpitaux et le Siège l’AP-HP, l’ARS et le Ministère de la Santé en fonction des niveaux et des sujets.
On dit souvent que la crise révèle toujours le pire comme le meilleur de chacun. Celle-ci n’échappe pas à la règle.
Si les vols de masques et autres produits de santé ont fait les gros titres de nombreux journaux, peu ont consacré leurs pages à tous ces personnels, soignants comme administratifs, qui se sont portées volontaires pour prêter main-forte. Pas un mot ou presque envers ces personnels retraités ou actuellement en disponibilité qui reviennent travailler pour renforcer les équipes déjà mobilisées. Et autant de belles rencontres avec des personnes, anciens de l’hôpital Bichat ou ex-membres de la Fonction publique hospitalière, qui souhaitent « aider ». L’engagement comme valeur cardinale, l’hôpital chevillé au coeur. Celui-ci en difficulté, les voilà qui reviennent en force. Hélène, Ariane, Laure, Allison, Amélie, Dorothée et tant d’autres personnes, on ne vous remerciera jamais assez. Autant d’échanges chaleureux avec celles et ceux qui viennent de Toulon, Brest, Bordeaux ou Montpellier. En tout, l’hôpital Bichat a trouvé plus de 300 professionnels (infirmiers et aides-soignants) pour répondre à la vague de patients de COVID. Dans ce nombre, il faut compter aussi sur le soutien d’une trentaine d’externes (étudiants en médecine) venus le temps de la crise occuper des postes de « faisant fonction ». A ces renforts, se sont ajoutés des volontaires venus soutenir les directions administratives dans cette nouvelle gestion.
Difficile de ne pas être fier de travailler avec ces personnels qui s’impliquent et s’engagent chaque jour davantage. Aux Français de les soutenir et les remercier. Pas seulement au cœur de la crise, mais une fois la crise passée. Le Ségur de la santé qui s’ouvre peut poser les premières fondations de l’hôpital de demain.
Appuyons-nous sur la leçon principale du COVID : l’hôpital est un formidable instrument lorsque l’ensemble des hospitaliers ne forment plus qu’un collectif en action.
Niveau témoignages, je vous conseille trois comptes Twitter de médecins (@DocArnica / @Wargonm / @LehmannDC)