Voilà l’Union européenne confrontée à une difficulté majeure : que faire face à une pandémie qui touche l’ensemble des Etats européens ?
On le sait, et alors même que la logique voudrait que face à une problématique identique, les Etats européens réfléchissent ensemble à des solutions communes, les Etats prennent des mesures dans leurs propres intérêts, sans aucune coordination les uns avec les autres, aggravant souvent les tensions, désorganisant davantage les liaisons vitales.
On l’avait déjà vu lors de la crise économique de 2008, où chaque Etat avait tenté dans son coin de sauver les meubles. La relance européenne qui n’était qu’une addition de relances nationales n’avait pas permis de donner le coup de fouet nécessaire à la reprise (voir Crise de 2008 : quel bilan 10 ans après ? (2/2)).
Dans un domaine, la santé, relevant bien moins des compétences de l’Union européenne que des Etats, il était évident que les Etats seraient encore moins tentés de s’en référer à l’Europe.
On ne parlera même pas de la nécessaire solidarité qui devrait prévaloir entre Etats membres d’une même organisation. Mais, déjà qu’elle est faible lorsqu’un seul Etat est en souffrance (la Grèce peut en parler avec une certaine amertume), elle est carrément inexistante lorsque tous sont touchés. Résultat, c’est la Chine qui vient donner des leçons de solidarité aux Européens.
On ne parlera pas non plus de l’incapacité des Etats à discuter entre eux, et à tirer des retours d’expérience sur la situation rencontrée par l’un d’entre eux. L’Italie, première touchée à grande échelle par l’épidémie n’a malheureusement pas servi d’exemple pour la France, l’Espagne, le Royaume-Uni et l’Allemagne.
Devant l’ampleur de l’épidémie, chaque Etat regarde midi à sa porte. Les premières frontières sont fermées, l’Allemagne venant compléter une liste initiée par l’Autriche et qui n’a cessé de s’allonger depuis. Il ne s’agit pas ici de discuter de l’opportunité qui s’entend aisément, mais de l’absence d’échanges entre Etats pour réfléchir à une organisation temporaire. Ce n’est pas la première fois que des tiraillements apparaissent, la crise migratoire et les attentats terroristes étant déjà passés par là. L’espace Schengen, cette fierté européenne, sera à nouveau remisé temporairement au placard. Faute de l’adapter aux situations exceptionnelles, les Etats risquent de le réduire à un lointain souvenir (voir Schengen ou la tentation des frontières).
Le pire concerne les produits de première nécessité en santé (des masques aux lunettes de protection). Voilà que les Etats là encore sans aucune coordination font main basse sur leur production et leurs stocks (https://www.lemonde.fr/economie/article/2020/03/14/covid-19-la-discrete-bataille-des-masques-entre-la-france-l-allemagne-et-l-italie_6033075_3234.html). Si l’idée peut sembler légitime, il ne faut pas oublier que les usines de production installées sur le territoire d’un Etat membre ont vocation parfois à fournir plusieurs Etats en même temps.
Pour autant, cette incapacité des Etats à faire appel à l’Union européenne ne doit pas occulter l’incapacité de cette dernière à exister. Déjà invisible depuis son intronisation, la Commission Von Der Leyen réagit toujours trop tard et trop peu (voir Europe : calme plat, morne plaine). Ne pouvait-on pas réquisitionner plus rapidement les stocks au niveau européen ? Ne fallait-il pas conserver une production européenne face à ce genre de situation ? Pourquoi n’y a-t-il pas de cellule de crise européenne ? Qu’attendent les institutions européennes pour demander le déblocage de fonds d’urgence ?
Alors que l’Europe est désormais l’épicentre de la pandémie en lien avec le coronavirus, l’Union européenne est totalement absente de la gestion de cette crise sanitaire.