(Chagall – Madrid)
En 2007, le Time, monument de la presse anglo-saxonne titrait sur la mort de la culture française. Outre une couverture au couteau, le dossier à charge allait provoquer moult débats, notamment dans le microcosme français. Déjà que l’oraison funèbre soit prononcée par un représentant du Phare de la Mondialisation ne pouvait que susciter de vives réactions au pays de l’exception culturelle. Ensuite, parler de l’état de son nombril est l’une des passions préférées de l’élite culturelle française. Sinon, cela fait bien longtemps que Bernard Henri Levy n’aurait plus accès à toutes les matinales radiophoniques. Et évidemment que je préfère à tout prendre ce dernier aux logorrhées verbales d’Eric Zemmour. Mais, ce n’est pas parce que j’évite un cancer que je veux forcément subir une diarrhée. Fin de la parenthèse.
Qui se souvient encore de cette mise à mort d’une certaine idée de la France par un hebdomaire anglosaxon ?
Pour mieux la comprendre, avant d’étudier le fond du sujet, il convient de rappeler le contexte. Sans vouloir prêter à l’auteur de mauvaises intentions, force est de constater que cet article s’inscrit dans quatre années de tensions franco-américaines suite au refus appuyé de la France de rejoindre la coalition américaine dans la guerre en Irak en 2003. La France fait par exemple l’objet de nombreuses moqueries transmises par le vecteur culturel américain. Un exemple parmi tant d’autres : un épisode des Simpsons où une scène gratuite caricature les officiels français comme des mangeurs de grenouille.
Cela étant dit, si l’article fit autant réagir, c’est bien qu’il visait parfois juste. En effet, l’auteur pointait notamment l’absence de récompenses majeures obtenues par les Français dans de nombreux domaines. Des dizaines d’année sans oscar pour le cinéma. Un dernier Prix Nobel de littérature datant de 2000 – si 7 ans peuvent paraître peu, il ne faut pas oublier que la France fait partie des principaux bataillons dans cette catégorie. A cette appréciation objective (le nombre de récompenses) s’ajoute des considérations plus subjectives mais a priori difficilement contestables. Combien d’artistes français connus en dehors des frontières hexagonales ? Qui derrière Johnny Hallyday décédé depuis ? Où sont les prochains Sartre, Camus et Malraux ? François Truffaut n’a-t-il pas de successeur ? Ne reste-t-il à la France que ses musées et sa gastronomie d’antan ? Bref, du patrimoine sous cloche mais qui n’apporte plus rien de nouveau.
Douze ans plus tard, quel regard apporter sur cette tribune ?
L’ironie a voulu qu’une partie du constat dramatique soit fortement relativisé. Depuis 2007, la France a décroché deux Prix Nobel de Littérature (Le Clesio en 2008, Modiano en 2014), plusieurs oscars parmi les plus prestigieux (Meilleur film – The Artist, meilleur réalisateur – Michel Hazanivicius, meilleur acteur – Jean Dujardin – et meilleure actrice – Marion Cotillard dans La Mome , meilleur compositeur – Desplatz ?). La France s’est même payée le luxe suprême de ne pas suivre l’Académie des Oscars et sa consoeur britannique et de privilégier Omar Sy à Jean Dujardin pour le César. Certains y verront certainement la preuve d’un vivier de talents français.
Pour autant, dresser un tel tableau ne doit pas conduire à enjoliver une situation pas si rose. Déjà, certains des oscars loin de célébrer le cinéma français visaient plutôt l’auto-célébration du 7e art américain et de son histoire. Ensuite, les quelques récompenses glanées ne doivent pas cacher l’état général de la culture française. Les Sartre, Camus et Malraux n’ont pas plus de successeur. Le rayonnement de la France a quelque peu perdu de sa superbe. Outre l’absence de grands noms, les oeuvres culturelles françaises s’exportent moins. Et s’il ne faut pas verser dans le déclinisme, un état des lieux raisonnable traduit bien le recul de la présence culturelle française. Il se voit d’ailleurs par la baisse des financements accordés aux instruments d’influence que sont les ambassades et les alliances.
Pour autant, le recul français ne s’explique pas seulement par la moindre qualité des oeuvres de l’Hexagone, mais aussi par une variété plus importante des oeuvres internationales. Il suffit de voir la diversité des palmarès internationaux. En effet, le monde s’ouvre sur d’autres cultures. Il est donc normal que les cultures fortement présentes aient tendance à reculer.
Derrière les cris d’orfraie lancés lors de la parution d’article, on peut déplorer l’absence de véritable politique mise en place. Dans une moue de circonstance, le Mime Marceau vous salue donc bien.
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La presse nord-américaine , la plus raciste, xénophobe et francophobe au monde, prise d’innombrables fois en flagrant délit de désinformation et de fake news, c’est Eric Zemmour puissance 1000.
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Quand on sait qu’aux USA une activiste délirante comme Judith Butler est qualifiée de « philosophe », on comprend mieux la phrase d’Oscar Wilde :
« Les États-Unis forment un pays qui est passé directement de la barbarie à la décadence sans jamais avoir connu la civilisation »
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