(Cour européenne des droits de l’Homme – Strasbourg, France)
Curieuse ironie du sort. David Cameron, lorsqu’il était Premier ministre, avait annoncé son intention de quitter le Conseil de l’Europe, une organisation européenne sans lien avec l’Union, et plus particulièrement de se détacher de la Convention européenne des droits de l’Homme, et de la surveillance de sa Cour. En parallèle, même s’il organisait un référendum sur l’appartenance à l’Union européenne, il militait – à sa manière – pour le maintien de son pays dans cette seconde organisation. On sait tous ce qu’il advint de la consultation et de son Premier ministre.
David Cameron démissionnaire et le Brexit actuellement en cours de négociation, qu’advient-il au fond du projet de quitter le Conseil de l’Europe ?
A première vue, il semble avoir disparu. En effet, même dans les déclarations enflammées contre le continent de Boris Johnson, on ne trouve nulle trace de cette question.
Pourtant, les sujets de crispation ne manquent pas non plus avec cette organisation. En effet, la Cour européenne des droits de l’Homme, dans plusieurs affaires, s’est notamment opposée à la privation systématique de vote pour les prisonniers britanniques. Même si elle a récemment tempéré ses décision, elle a maintenu sa jurisprudence.
Cette jurisprudence bien que volontairement inappliquée par le Royaume-Uni a concentré les critiques dans le pays. Et de nombreux responsables politiques avaient demandé à sortir de cette organisation, et notamment de revenir sur l’adhésion à la Convention européenne des droits de l’Homme.
Justement, bon nombre des critiques britanniques portées par le camp du Leave face à l’Union européenne pouvaient aisément être transposées à cette organisation. D’une part, les arrêts de la Cour européenne des droits de l’homme doivent s’imposer aux Etats membres (et notamment priment les délibérations du Parlement britannique). D’autre part, le Conseil de l’Europe représente un coût pour le pays, argent qui pourrait être transféré pour aider au fonctionnement du NHS (voir National Health Service : le grand corps malade du Brexit ?).
Paradoxalement, toutefois, la perspective d’une sortie de l’Union européenne est en train de reporter les questions autour du maintien dans la Convention européenne des droits de l’homme.
En effet, déjà, les dirigeants actuels du Royaume-Uni ne veulent pas ouvrir plusieurs fronts en même temps. Les négociations avec l’Union européenne accaparent suffisamment les Britanniques, qui semblent incapables de pouvoir ouvrir un deuxième sujet de discussion.
Par ailleurs, en sortant de l’Union européenne, cette organisation devient leur seul lien de rattachement avec le continent européen. Dès lors, compte tenu des discours politiques britanniques qui ne cessent de rappeler combien le Brexit ne signifie pas que le Royaume-Uni quitte le continent, il paraît difficile de mener dans le même temps le retrait de la deuxième organisation européenne, derrière l’Union européenne.
Dès lors, il paraît peu probable d’envisager une sortie du Royaume-Uni à court terme du Conseil de l’Europe. La vie offre des situations pleines d’ironie.
Voir aussi CEDH : Et si le Royaume-Uni avait raison ?
Voir aussi tout le dossier consacré sur le Brexit (ici), et notamment les derniers articles :
– Le Brexit, c’est maintenant ?
– Les Britanniques sur le départ, les Européens au travail ?
– Brexit : les enjeux (Volume 2)