2019 : année charnière pour l’Europe ?

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(Turin)

L’Union européenne semble aujourd’hui à un carrefour de son histoire. Certes, l’Europe s’est construite à travers les crises qui l’ont jalonnée. Longtemps, à chaque difficulté, elle savait rebondir. Aujourd’hui, l’Europe fait face à une « polycrise » dont elle ne semble plus pouvoir se dépêtrer, crise initiée en 2005 avec le double non au référendum français et néerlandais, crise qui s’est aggravée avec la récession économique de 2008 – sans parler de la crise migratoire. Pourtant, l’Union européenne a tenté de remédier à ces maux qui la rongeaient. Mais, elle agit souvent trop peu et trop tard, donnant l’impression de ne rien faire, voire de mal faire. Il a manqué, plus que de nouveaux traités, de la volonté, aussi bien au niveau des institutions européennes que des Etats. Les premières ont souvent été aux abonnés absents, les seconds ont passé leur temps à chercher querelle avec Bruxelles, grattant au passage quelques points de popularité. Sur ce point, David Cameron est allé le plus loin, avec le succès que l’on connaît.

Dans ce contexte un peu particulier, deux événements majeurs vont se dérouler cette année.

Tout d’abord, le Brexit. Plus de deux ans après le référendum, le Royaume-Uni devrait quitter l’Union européenne. Néanmoins, le plus grand flou demeure. Aussi bien sur les modalités de la sortie que sur la suite à donner à la relation. La vérité d’un jour n’est pas celle du lendemain, tant Theresa May se retrouve écartelée entre les exigences multiples des Britanniques, sans parvenir à répondre aux conditions des Européens (voir Brexit : un divorce partiel douloureux).

Sauf revirement de dernière minute, à la fin de l’année 2019, et ce pour la première fois, l’Union européenne finira une année moins nombreuse qu’elle ne l’avait commencée. Si ces deux ans ont permis d’écarter tout éclatement consécutif au Brexit, l’Union européenne s’est avérée incapable de penser son avenir. Paralysées par les enjeux de présent, les institutions européennes ne se projettent pas vers le futur, empêchant la construction de projets politiques véritables qui pourraient faire l’objet de débats et d’échanges. L’Europe ne peut rester au milieu du gué, qui font des Etats les décideurs et les institutions européennes les responsables.

Ensuite, les élections européennes 2019. Quarante ans après avoir ouvert ce processus aux citoyens, ces élections pourraient conduire à l’arrivée massive de partis populistes, voire même à leur mainmise sur le Parlement européen (voir Populismes en Europe – objectif : élections européennes 2019 ?).

A l’instar du Président de la Commission européenne, Jean-Claude Juncker, qui parlait lors de la prise de son mandat « Commission de la dernière chance », la nouvelle législature apparaît d’ores et déjà comme le « Parlement européen de la dernière chance ». A supposer qu’une majorité de partis politiques proeuropéens soit possible, ces eurodéputés ne devront pas faillir.

Car, il faut l’admettre, Jean-Claude Juncker a raté sa mission (voir Jean-Claude Juncker ou le verre à moitié vide). Mais, le Parlement européen aussi (voir La revalorisation du Parlement européen : quel bilan ?). Il n’a jamais pris fermement position dans la plupart des débats qui ont eu lieu. Il s’est avéré incapable de pousser la Commission à intervenir sur certains sujets qui éloignaient l’opinion publique de l’UE. Il n’a jamais su contrôler la Commission (des rencontres avec Barroso à la nomination de Selmayr).

Les responsables politiques actuels ont quelque chose des « somnambules » du récit de C. Clark : « personne ne souhaite que cela arrive, mais à part cet intérêt commun, chacun défend des intérêts particuliers ». On le voit bien dans les négociations avec le Royaume-Uni où institutions et Etats membres savent être unis. Mais, cet exemple loin d’être une tendance globale n’est qu’un cas isolé.

2019 sera une année charnière de la construction européenne, qui peut aussi bien constituer la première marche du déclin que le premier jalon du sursaut. Le sort de l’Union européenne est entre les mains des citoyens. Mais, ils n’accepteront d’intervenir que si celle-ci sait se montrer indispensable. La partie est encore loin d’être gagnée.


Voir aussi 2019 : l’année du populisme ?

Sur les élections européennes, voir le dossier consacré ici.

Sur le Brexit, voir le dossier consacré .

 

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