(Reprise d’une oeuvre du peintre Monet – Metz)
J’ouvre une parenthèse pour laisser libre cours à quelques réflexions sur un sujet complexe et large. Difficile d’ignorer que ce samedi 17 novembre, une part non-négligeable de la population a décidé d’exprimer son mécontentement quant à la hausse à venir sur la taxation des carburants. Qu’importe ici qu’à cette opposition première se soit agrégée des revendications diverses.
Evidemment, le « ras-le-bol » fiscal théorisé en son temps par Pierre Moscovici joue certainement une part importante dans la motivation de nombreux Français à rejoindre le mouvement.
C’est d’ailleurs au nom de cette taxation tout azimut que la droite s’est rangée au côté des contestataires. Depuis toujours, la droite privilégie – dans ses discours – aux impôts des mesures d’économie. Qu’importe, si l’un dans l’autre pour les classes dites « populaires » et « moyennes », cela se traduise sensiblement par la même chose puisqu’aux bénéfice qu’elles retirent de la baisse des taxes répond les pertes qu’elles subissent, résultat des fameuses économies. Mais, ceci nous éloigne quelque peu du sujet présent.
Cette manifestation est aussi soutenue, de manière plus surprenante a priori, par une part non-négligeable de la gauche, arguant notamment que cette taxation est injuste puisqu’elle a été précédée de « cadeaux » à destination des plus riches. On répercuterait ainsi sur les plus pauvres le coût des moindres impositions obtenues par les plus riches (voir Réforme de l’Impôt de solidarité sur la fortune : une erreur à plusieurs titres).
Pour répondre à la contestation croissante, le Gouvernement a eu beau jeu de sortir l’argument de l’écologie. Ces taxes permettraient de financer la transition écologique. Satisfaisant ?
Visiblement non, à voir la volée de bois verts reçus.
D’une part, pour un Gouvernement accusé de porter peu d’intérêt à la question écologique, cette justification ressemble à s’y méprendre à une pirouette. En effet, entre le positionnement ambivalent de la République en Marche sur le glyphosate et la démission fracassante de Nicolas Hulot (voir Hulot et Collomb : deux démissions qui interrogent), on peut difficilement se réjouir de véritables avancées. Le fameux « Make planet great again » d’Emmanuel Macron, coup de com’ astucieux, ne s’est traduit par aucune réalisation concrète. Et ce n’est pas avec l’inscription à l’article Premier de la Constitution d’une considération sur le climat que l’on fera passer l’urgence climatique au premier plan – à moins de prêter au verbe constitutionnel des pouvoirs ésotériques remarquables. Au demeurant, il faut relever que la majorité du produit des taxes ici incriminées ne sert pas à financer la transition écologique (voir l’article des Decodeurs).
D’autre part, les Français n’ont plus envie de faire effort sur cette question. On se souvient de la saillie de Nicolas Sarkozy sur l’écologie : « L’environnement, ça commence à bien faire ». Elle reflète un état d’esprit largement partagé parmi la population. En effet, l’enjeu écologique apparaît le plus souvent comme une punition collective, se déclinant en de nombreuses contraintes individuelles (triage des déchets, choix des produits, activités pratiquées, etc…). A cet égard, le mouvement des gilets jaunes n’est pas sans rappeler les bonnets rouges d’antan, qui pour des motifs voisins s’opposaient à une nouvelle taxation érigée en symbole écolo – feu l’écotaxe.
Justement, prenons un peu de recul et abordons la problématique plus large, de la transition écologique. En définitive, l’urgence écologique – encore faut-il en prendre conscience – ne peut se satisfaire d’une réponse partielle ou graduée. Elle demande un changement radical de nos comportements et de nos modes de vie. Comme tout un chacun, je suis plutôt sensible à cette problématique. J’essaie à mon niveau de « faire attention ». Je privilégie de plus en plus les produits bio – et locaux [NB : cela n’a aucun sens d’acheter régulièrement des kiwi bio qui viennent de Nouvelle-Zélande ou des graines qui proviennent du fin fond de l’Amérique du Sud.], je réduis ma consommation de viande, je priorise les transports en commun, en évitant taxis et voiture aussi souvent que possible. Et de manière générale, hors voyages à l’étranger, je ne prends jamais l’avion, n’hésitant pas à prendre des trains de 8 heures – la question du coût étant un argument non-négligeable [NB : Je ne sais que penser de la dernière repentance permise par certaines compagnies aériennes : monnayer plus cher son billet pour « compenser son empreinte carbone ». Visiblement, tout se vend en ce bas monde.].
Pour autant, tous ces changements – majeurs à mon échelle – sont mineurs au niveau de la planète. Ca permet certes d’avoir la conscience tranquille – celle de la personne qui a accompli sa bonne action – mais, ça ne répond nullement de manière satisfaisante au problème.
Surtout, une réponse au défi écologique ne peut être individuelle, elle doit être globale. Et ici, forcément, on pense à tous ces Etats – Etats-Unis en tête – qui ont envoyé cul par-dessus la tête cette question-là.
Sur cette question, pourtant, il existe, à défaut de réponse encore globale, une possibilité intermédiaire. Elle prendrait la forme de l’Union européenne, et nécessiterait que cette dernière se saisisse. Une taxe carbone comme l’avait avancée Nicolas Sarkozy au niveau des frontières européennes obligerait les entreprises à changer leurs pratiques – au risque de se couper du premier marché mondial -, mais aussi conduirait les consommateurs à privilégier des circuits courts.
Néanmoins, cette orientation des consommateurs vers de nouveaux modes de vie ne peut être uniquement effectuée sur l’angle de la contrainte ou de la pénalité financière. Il faut les accompagner, en réduisant les taxes sur les produits créés ou fabriqués à proximité, en favorisant une meilleure lisibilité de la composition et de l’origine des produits, en offrant de véritables alternatives aux anciennes pratiques. Vouloir réduire la place de la voiture individuelle est par exemple une bonne chose. Mais, cela n’a aucun sens s’il n’existe aucun chemin pédestre ou cycliste pour les parcours courts et une véritable intermodalité des transports en commun pour les parcours longs. Il reste beaucoup à faire pour avoir des citoyens en matière d’écologie. Mais, c’est à l’Etat d’incarner d’abord une puissance publique responsable. Après tout, n’est-ce pas lui le « maître des horloges » ?
Sur la question de la taxation : Gilets jaunes : volée de bois vert sur l’impôt
Sur celle de la réponse : Gilets jaunes : colère sociale, réponse politique ?
Sur la responsabilité de l’Europe : Gilets jaunes : la faute à l’Europe ?
P.S. : Je diffuse ici le message d’une amie, Gabrielle, publié sur Facebook et qui contient quelques idées pour améliorer non seulement son quotidien mais aussi l’avenir de la planète. Je le reproduis in extenso ci-dessous
« Je suis tout autant persuadée :
1. Que cette transition peut être, non pas un fardeau, mais un chemin vers une vie meilleure, individuelle et collective.
2. Que chacun d’entre nous peut réellement faire quelque chose à son échelle, et que la clé de la réussite c’est cet engagement de chacun. Car nous sommes à la fois des individus et des consommateurs et des salariés et des citoyens, donc si nous changeons individuellement nous faisons changer aussi les entreprises et les politiques.
Pour être concrète, j’ai envie de vous partager des exemples d’actions qui peuvent être à notre portée. Mises bout à bout, et répliquées par un nombre croissant de personnes qui auront envie de s’y mettre, elles peuvent changer le monde. Ce ne sont bien sûr pas des injonctions, mais des propositions d’inspiration pour l’action !
Dans notre vie quotidienne, pour tous ceux qui ont un peu de marge de manœuvre financière 💰, nous pouvons ouvrir la route pour les autres en:
– faisant nos courses d’alimentation auprès des acteurs qui proposent des produits bio et locaux, avec une éthique cohérente (mention spéciale pour Biocoop, mais il y a aussi les AMAP, les producteurs du coin si on est plutôt en milieu rural, etc…)
– changeant de fournisseur d’électricité pour choisir Enercoop
– achetant de plus en plus de choses (objets, vêtements, meubles…) fabriquées en France, dans des matériaux renouvelables et destinés à durer, et notamment de moins en moins de plastique.
Sans que ça nous coûte rien, on peut aussi:
– changer de banque 💶 et choisir le Crédit coopératif ou la Nef
– pour tous ceux pour qui c’est possible, faire l’essai d’aller au bureau à 🚲, juste pour voir (attention, vous risquez d’être conquis 😀)
– arrêter d’acheter les produits des marques les moins respectueuses de l’environnement : si on est nombreux, on peut être sûrs que les entreprises concernées changeront leurs pratiques
– acheter un smartphone reconditionné (ou un Fairphone) plutôt qu’un neuf de marque classique
– se poser la question de voyager en train plutôt qu’en avion : ce n’est pas toujours possible mais parfois oui ; ça peut être l’occasion d’un voyage plus long (quoique) mais agréable.
– demander au passage à la cantine ou au resto « au fait, d’où vient la viande? Ah, bon. Si elle pouvait être française la prochaine fois, ce serait encore mieux! » ou « au fait, vos légumes sont bio? Ah, non? Dommage, et vous pensez à changer? » Au fur et à mesure la prise de conscience progresse
– pour les pauses déjeuner speed, refuser les sacs en papier et autres couverts jetables et avoir les nôtres dans le tiroir de notre bureau.
Mais on peut aussi agir dans notre activité professionnelle 🤓, par exemple:
– si on travaille dans le BTP, en parlant de réemploi des matériaux issus de démolition, d’utilsation de matériaux de construction biosourcés/recyclés/locaux, etc.
– dans le domaine de la santé, en aidant sa profession à regarder en face les effets des pesticides, des perturbateurs endocriniens, etc. etc.
– si on travaille dans le conseil, en suggérant à l’entreprise qu’on conseille d’opter pour une vraie stratégie de transition écologique
– en entreprise, en interrogeant la direction et les services concernés sur le recyclage du papier et du reste (malheureusement ça laisse encore souvent à désirer), sur les déplacements d’entreprise (conversion de la flotte automobile à l’électrique ? encouragement à prendre le train?), la cantine, etc.
– si on travaille en lien avec des agriculteurs, en les aidant à changer leurs pratiques
– si on conçoit des marchés publics (ou des appels d’offre privés d’ailleurs), en intégrant des clauses réellement ambitieuses pour la transition écologique, qu’il s’agisse d’achats, de restauration, de travaux…
– dans l’industrie, en orientant l’innovation vers les technologies décarbonées et vertueuses pour l’environnement; si l’entreprise fabrique des objets concernés par l’obsolescence programmée, designer plutôt des objets qui durent
– dans l’administration ou la politique locale, en disant non aux projets qui artificialisent les sols
– au bureau ou sur tout lieu de travail: proposer à ses collègues des actions écologiques modestes mais efficaces pour la prise de conscience: utiliser des vraies tasses et pas des gobelets jetables, bannir les bouteilles en plastique, etc.
Et enfin, parler d’environnement autour de nous, interroger, faire réfléchir notre grand-mère, notre beau-père, nos amis, nos voisins, notre collègue de bureau, le commerçant avec qui la discussion s’est engagée… Changer ses habitudes n’est facile pour personne mais c’est possible pour tout le monde!
Merci de m’avoir lue 💛 Mon but n’est surtout pas de vous agacer, donc si mon message vous énerve, mille pardons et oubliez-le vite. Si jamais au contraire vous avez envie de le partager, feel free! »
Oui, et on pourrait ajouter un point : le gouvernement mise sur le développement des voitures électriques, or il s’agit d’une hérésie scientifique. Les voitures électriques fonctionnent grâce à des batteries au lithium, dont l’extraction est extrêmement polluante ! En fin de compte, les voitures électriques ne sont pas moins polluantes que les voitures à carburant : leur développement ne ferait que déplacer la pollution mais n’aurait aucun bilan écologique positif au niveau planétaire. Et au lieu de nous rendre dépendants des pays du golfe, elle nous rendrait dépendants de la Chine. On marche sur la tête.
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Il me semble que la transition écologique n’est pas la vraie question : pure rhétorique démagogique de LREM. Outre l’arrogance inouïe dont font preuve Macron et son entourage (jamais je n’avais vu un chef d »état, français ou pas, insulter ses concitoyens lorsqu’il se déplace à l’étranger), le fait est que sa politique contribue à appauvrir la France rurale et celle des DOM-TOM. De plus en plus, les petites communes voient leurs ressources diminuer comme peau de chagrin, des lignes de chemin de fer disparaissent, des écoles et des hôpitaux ferment ou sont regroupés. La majeure partie du territoire est ainsi délaissée, et aux Français qui vont devoir plus utiliser leur voiture du fait de la politique du gouvernement, celui-ci dit qu’il est nécessaire de moins l’utiliser. Pure démagogie d’un point de vue écologique (car l’écologie est un problème ne pouvant être réglé qu’au niveau international et la voiture électrique n’est pas une alternative cŕédible, comme l’a d’ailleurs signalé Maldoror dans son post ) et politique indéfendable sur le plan éthique, dans la mesure où elle a pour effet de fragiliser encore plus le socle républicain, lequel suppose une égalité entre les territoires qui la composent. Je regrette chaque jour d’avoir voté Macron et de ne pas m’être abstenu : c’est selon moi le pire président de la 5ème République.
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