(Buckingdham Palace – Londres, Royaume-Uni)
Départ prochain du Royaume-Uni oblige, les rencontres entre Européens et Britanniques se suivent à un rythme effréné. Pour autant, malgré des compromis ici et là, les négociations patinent et la perspective d’un no-deal tant redouté par les deux parties se rapproche.
Cela étant dit, un scénario ne cesse de se dessiner à mesure que s’entrevoit la sortie du Royaume-Uni. L’idée serait de s’accorder autour de quelques grandes lignes, et de renvoyer à plus tard les détails. En somme, un cadre d’accord, accompagné d’une déclaration politique. Cette solution permettrait de laisser davantage de temps aux négociateurs pour parvenir à un accord définitif. Il faut rappeler que le Royaume-Uni restera lié à l’Union européenne tout au long de la période de transition – au moins jusqu’à fin 2020 (voir L’après Brexit : la période transitoire (1/2)).
Or, cette stratégie a priori avantageuse n’est pas sans risque.
Déjà, les négociateurs ont eu recours à un procédé similaire à l’occasion de la phase 1. Pour rappel, dans les négociations, les Européens avaient exigé de s’accorder d’abord sur les modalités de retrait du Royaume-Uni (règlement financier, droit des citoyens, question irlandaise), avant d’aborder le futur accord commercial. Pour respecter le délai imparti, le calendrier de négociations prévoyait de résoudre la phase 1 avant fin 2017. On s’en souvient, un accord avait été trouvé au dernier moment, la Commission jugeant les progrès suffisants (voir Brexit ou l’illusion du mouvement). Européens et Britanniques s’étaient félicités de ces avancées. Il n’a pourtant pas fallu attendre longtemps avant que le compromis trouvé ne révèle ses lacunes. Faute d’entrer dans le vif du sujet, il était terriblement flou et lacunaire, emportant diverses acceptations. La question irlandaise qui aurait dû être au préalable réglée n’a jamais semblé aussi prégnante qu’en ce moment (voir Question irlandaise et Brexit : la quadrature du cercle). On voit bien qu’à vouloir aller trop vite pour donner l’illusion d’avancer, les Européens et les Britanniques n’ont fait que retarder l’échéance et les inévitables discussions. Même les points qui semblaient résolus – comme le règlement financier -, semblent remis en cause. Ne l’oublions pas, il ne peut y avoir d’accord tant qu’il n’y a pas d’accord sur tout. Et d’accord, il en faudra deux : l’un pour le retrait, l’autre pour la future relation. Or, le diable est souvent dans les détails.
Au demeurant, à force de repousser les difficultés, les Européens envoient un message brouillé. Ainsi, politiquement, cette solution aboutit à donner l’impression aux Britanniques qu’il est toujours possible d’allonger les temps de discussion, atténuant le sentiment d’urgence et impactant la formulation de compromis. On le voit bien, alors que les Britanniques se font peu à peu l’idée d’une période de transition extensible, allant potentiellement jusqu’à 2022 !
Il convient de régler au plus vite – et véritablement- les points sensibles des futurs accords entre le Royaume-Uni et l’Union européenne. A commencer par l’accord de retrait. Il restera encore – et c’est loin d’être une mince affaire – à trouver un compromis sur la relation future. Une fois l’accord sur le retrait trouvé, l’accord sur la relation future devra encore être accepté par l’ensemble des Parlements nationaux. En attendant, il vaut mieux une absence d’accord qu’un accord de principe qui ne résoudrait rien.
Voir A six mois de la sortie du Royaume-Uni, le Brexit dans l’impasse