(Big Ben en travaux – Londres, Royaume-Uni – 2017)
Sans grande surprise, le Conseil européen – les 27 Etats ici – a rejeté le plan de Theresa May quant aux nouvelles relations entre le Royaume-Uni et l’Union européenne. Faut-il vraiment le rappeler ? Le temps joue contre le Royaume-Uni. Chaque jour qui passe renforce le scénario d’un no-deal. En effet, au 31 mars 2019, ce pays sera considéré comme un Etat tiers à l’Union. Sauf accord de dernière minute entre l’ensemble des Etats membres et les Britanniques pour prolonger les négociations.
Pourtant, malgré des débuts initialement cahoteux (changement de Premier ministre, débat interne sur le rôle du Parlement britannique, discours offensif de Theresa May en janvier 2017, retard dans l’envoi de la notification), la fin de l’année 2017 avait marqué un véritable tournant. On ne reviendra jamais assez sur l’impact des élections législatives de cette fin d’année-là, privant Theresa May de tout leadership au sein de son propre parti (voir Brexit : l’inconséquence électorale).
En attendant, Européens et Britanniques avaient célébré en grande pompe – prématurément ? – la fin de la phase 1 portant principalement sur la sortie du Royaume-Uni, notamment les 3 points de cristallisation (règlement financier, question irlandaise et droits des résidents européens). Oui mais voilà, la fumée blanche que certains ont cru un peu vite discerner ressemblait davantage à un écran de fumée (voir Brexit ou l’illusion du mouvement). Comment expliquer ce malentendu ?
Déjà, la question irlandaise n’a jamais été vraiment résolue. Certes, le Royaume-Uni s’était engagé à assurer l’absence de frontière physique en Irlande. Mais, cette concession était principalement motivée par la certitude qu’avaient les Britanniques de trouver une solution qui permittrait de répondre aux exigences européennes tout en satisfaisant aux aspirations sur place. Or, depuis, l’ensemble des propositions britanniques a été retoqué par l’Union (voir Question irlandaise et Brexit : la quadrature du cercle).
Ensuite, comme l’avait déjà mis en garde le président du Conseil européen Donald Tusk à l’époque, « le plus dur, ce n’est pas la séparation, c’est la construction d’une nouvelle relation après la séparation ». En effet, le Royaume-Uni ne veut pas, contrairement à ce que disent ici et là des eurosceptiques patentés – perdre toute relation avec l’UE. L’ancien eurodéputé Jean-Louis Bourlanges a magnifiquement décrit la situation : « Avant, la Grande-Bretagne avait un pied dans l’Europe et un pied dehors, maintenant, cela va être l’inverse. » La future relation que veut construire le Royaume-Uni ne repose pas sur l’existant- ce serait trop simple. Theresa May souhaite garder la face politiquement et se concentre sur les symboles, qu’importe si dans le fond, ca ne change rien ou pas grand chose. Un exemple caricatural de ce positionnement particulier est la place des Britanniques dans l’Union douanière. Le gouvernement actuel a confirmé qu’il quitterait l’Union douanière pour mettre en place un autre forme d’union douanière qui ne serait pas l’Union douanière mais qui aurait les mêmes effets que celle-ci. Vous trouvez ça inutilement compliqué ? C’est un sentiment parfaitement normal.

Preuve de la fébrilité britannique, certains ministres reviennent sur certaines questions en principe déjà résolues. Ainsi, le règlement financier (c’est-à-dire la dette du Royaume-uni à l’égard de l’Union) fait à nouveau l’objet d’un chantage, en plus d’être détourné de son sens initial. Il est souvent décrit – à tort – comme une sanction européenne contre les Britanniques.
En réalité, il ne peut y avoir d’accord général tant qu’il n’y a pas d’accord sur tout.
Sur ce sujet, voir Brexit ou l’impossible unité ? et Brexit : quels enjeux ?
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