Uchronie télévisée : The man in the high castle

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(Château d’Hikone, Japon – 2014)

Dérivée de l’utopie, l’uchronie offre une perspective intéressante pour l’étude de nos sociétés et de leurs évolutions. Alors que l’utopie se caractérise littéralement par un monde en dehors de tout lieu – en résumé, un monde qui n’existe pas -, l’uchronie met en place un monde en dehors du temps – en résumé, un monde qui aurait pu exister -.

Généralement, les créateurs d’uchronie prennent un point de basculement au cours de l’histoire (ex : la victoire des Etats-Unis face à l’Allemagne nazie en 1945) pour s’interroger sur le monde qui aurait pu advenir dans un autre contexte.

Plus particulièrement, j’aimerais aborder sur ce blog deux uchronies, l’une télévisée, l’autre littéraire, qui traitent toutes deux du même pays, les Etats-Unis, au cours d’une période proche, l’après-guerre pour la série TV, l’avant-guerre pour le livre.

Après avoir examiné dans un article précédent Le complot contre l’Amérique de Philip Roth sur l’avant-guerre (voir Uchronie littéraire : Le complot contre l’Amérique), il me semble intéressant de traiter son versant postérieur, The man in the high castle. 

Dans cette série basée sur un roman de Philip K. Dick, les Etats-Unis ont perdu la 2e Guerre mondiale face à la coalition du Japon et de l’Allemagne. Une bombe nucléaire a détruit Washington. Le pays est coupé en deux entre les deux puissances vainqueurs (à l’Ouest, les Japonais ; à l’Est, les Allemands).

Cette série arrive à la fois à développer le monde post-1945 au niveau d’une société mais aussi des relations internationales.

Tout d’abord, en se focalisant sur plusieurs personnages au sein des Etats-Unis, la série rappelle que la Résistance au sein d’un pays occupé est rarement la règle, plutôt l’exception ; la plupart des personnes adoptant une attitude relativement apathique, si ce n’est complaisante avec le nouveau régime (le comportement du marchand d’antiquités est à cet égard exemplaire).

Ensuite,  la série ne manque pas de développer ses personnages, qui loin d’être ou tout blanc ou tout noir occupent un large éventail de gris. De l’officier SS aux Résistants, il n’y a ni vraiment gentils ni vraiment méchants.

Pour autant, la grande force de la série, notamment par rapport au livre trop ancré sur la vie – assez floue – de ses personnages [preuve une nouvelle fois qu’une série peut être meilleure qu’un livre ; voir The handmaid’s tale ou la chute de la démocratie] est de s’intéresser aux enjeux géopolitiques, notamment aux conséquences internationales d’une victoire des Allemands dans la 2e Guerre mondiale..

Ainsi, au niveau international, la Guerre froide qui opposa Etats-Unis et Russie est transposée ici dans les tensions entre Japonais et Allemands. En effet, la stratégie d’expansion de l’Allemagne ne peut que finir par se heurter aux territoires sous contrôle japonais. En parallèle, la question de la succession d’Adolf Hitler offre un éclairage plaisant sur les rapports de force entre les hiérarques du 3e Reich.

En fin de compte, la série vient rappeler un principe de vie essentiel : rien n’est écrit, tout reste à faire. Ainsi, du passé qu’il est parfois plaisant de contempler avec les certitudes que permet le présent, il ne faut jamais oublier qu’un tout autre scénario aurait pu voir le jour. Quant au futur par nature imprévisible, nos actions le détermineront. A chacun d’en tirer les conséquences.


Sur ce thème, voir Uchronie littéraire : Le complot contre l’Amérique

Sur les séries télévisées, voir notamment House of cards, Baron Noir, Borgen et Veep : quatre déclinaison de la politique dans les séries et Brain Dead ou le néant de la politique.

 

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