(Marionnette européenne – Europa Park – 2013)
« Alerte disparition ! On recherche activement Jean-Claude Juncker, un Luxembourgeois d’une soixantaine d’années, qui présiderait aux destinées européennes. Si vous le retrouvez, merci de prévenir les autorités compétentes. » Ce petit ton moqueur en ouverture ne doit pas occulter la diète médiatique de l’omniabsent Président de la Commission européenne.
En effet, Jean-Claude Juncker, et une bonne partie des commissaires européens semblent étrangement discrets. Même le récent recours à l’article 7 TUE pour potentiellement suspendre les droits de la Pologne a été vidé de toute connotation trop politique (voir Activation de l’article 7 du Traité sur l’Union européenne contre la Pologne : à quitte ou double ?).
Plusieurs éléments peuvent expliquer ce recul dans les médias.
Tout d’abord, la Commission n’échappe pas, à l’instar des autres pouvoirs, à la réduction du temps politique. Ainsi, la campagne présidentielle française a commencé dès 2016. La campagne européenne prévue pour 2019 se prépare dès à présent (voir Elections européennes : 2019, c’est maintenant). En effet, le renouvellement du Parlement européen s’accompagnera d’un changement des commissaires, à commencer par le Premier d’entre eux qui a d’ores et déjà annoncé qu’il ne se représenterait pas. Or, ce retrait choisi très tôt par Jean-Claude Juncker a réduit considérablement l’influence de ce dernier. Qui prend le temps d’écouter quelqu’un qui ne pèsera plus par la suite ?
Ensuite, le pire paraît avoir été évité. A cet égard, les campagnes électorales de 2017 ont globalement été une réussite pour les forces proeuropéennes. Un certain sentiment du « devoir accompli » pourrait ainsi conduire aujourd’hui à une sorte de relâchement.
Par ailleurs, et malgré la volonté affichée par Jean-Claude Juncker dès sa nomination comme Président, sa Commission n’aura jamais su être vraiment « politique ». En effet, entre des têtes d’affiche méconnues ou recyclées, elle n’est pas arrivée à catalyser médiatiquement.
Il est vrai qu’en France, le représentant de la Commission, Pierre Moscovici, commissaire aux affaires économiques et financières souffre de son positionnement politique. Il est encore membre du Parti socialiste, un parti qui n’a pas dépassé les 7% depuis quelques temps.
A cela, il faut ajouter les stigmates laissés par le choix du Président de la Commission européenne. En effet, même si c’est le Parlement européen qui a eu le dernier mot dans cet arbitrage, force est de constater que les Etats membres avaient pris soin en amont d’éviter les personnalités politiques d’envergure comme têtes de liste. Pour rappel, le parti d’Angela Merkel, la CDU, avait pesé fortement dans la désignation de Jean-Claude Juncker face au Français Michel Barnier.
Osons donc poser la question. Hormis le cercle bruxellois, qui connaît Mesdames Vestager et Maelstrom, pourtant deux des Commissaires les plus engagées et les plus reconnues dans leur domaine ?
On pourrait certes dire la même chose de certains ministres en France. Mais, force est de constater que leur temps d’antenne est indiscutablement plus élevé.
Pourtant, la Commission occupe une place essentielle dans la construction européenne. D’une part, elle est à l’initiative des textes européens. D’autre part, elle est censée incarner l’intérêt général européen.
Aujourd’hui, elle paraît davantage soucieuse de gérer la boutique, en attendant que d’autres récupèrent le flambeau. Cela ne l’empêche pas d’effectuer quelques coups d’éclat : sanction contre Google, poursuite de la Pologne, … Oui, comme Galilée abdiquant devant l’Eglise, il pourrait être tentant de se rassurer en se disant : « et pourtant, elle tourne ».
Mais, cet effacement la prive de lancer le véritable chantier : l’avenir de l’Europe ; quand cet effacement ne conduit pas à la mainmise de certains hauts fonctionnaires sur l’institution, à commencer par Martin Selmayr (voir les dessous de sa nomination, sur le blog du journaliste Jean Quatremer, Coulisses de Bruxelles).
Aujourd’hui, quid des 5 scénarios proposés en 2016 qui devaient permettre la refondation du projet européen sur de nouvelles bases (voir Les 27 en quête d’un cap) ? Personne ne semble plus y faire mention ou s’y intéresser. Pourtant, l’Europe a elle aussi besoin d’une (r)évolution.
Un petit bilan de la Présidence Juncker est à retrouver ici : Jean-Claude Juncker ou le verre à moitié vide
Sur ce thème, voir aussi Elections européennes : 2019, c’est maintenant et Elections européennes 2019 : l’heure d’un débat public ?
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Vestager et non Vestdager
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