L’après Brexit : l’accord commercial 2/2

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(Le déluge – Musée des Beaux-Arts de Nantes – 2017)

Après avoir trouvé un accord dans les grandes lignes concernant le règlement du passif, il reste désormais à envisager les relations futures entre l’Union européenne et le Royaume-Uni, qui vont occuper les négociateurs durant cette deuxième phase.

Il convient pour se faire de distinguer deux périodes, celle du court terme – voir L’après Brexit : la période transitoire (1/2) – et celle du long terme – l’objet de ce billet.

Une fois le départ du Royaume-Uni acté et la période de transition finie, quel cadre régira les relations entre le Royaume-Uni et l’Union européenne ?

En l’absence de tout accord, le Royaume-Uni serait considéré comme un Etat tiers vis-à-vis du continent. Il ne bénéficierait plus d’un accès automatique au marché intérieur. L’ensemble des marchandises serait soumis à des droits de douane plus ou moins élevés. De plus, le secteur des services serait particulièrement impacté puisqu’il n’y aurait plus de libre prestation de services. Il s’agit du régime applicable à tous les Etats parties à l’Organisation Mondiale du Commerce.

Néanmoins, ce cas de figure extrême reste improbable. Après avoir fait croire – ou s’être convaincu – que « pas d’accord était mieux qu’un mauvais accord », le Royaume-Uni est (re)devenu raisonnable et souhaite désormais un accord. En effet, le marché commun de l’Union européenne présente trop d’avantages pour que le Royaume-Uni renonce à y accéder à moindre coût (voir 50 ans du marché commun entre réussites économiques et compétitions déloyales), quitte à tolérer l’emprise juridique de l’Union.

Reste à déterminer quel accord. Longtemps, Theresa May a privilégié le flou quant à ses réelles intentions, indiquant à la fois vouloir sortir du marché intérieur et souhaiter un accord le plus large possible. Aujourd’hui, le Royaume-Uni a quelque peu clarifié sa position et s’est montré intéressé par un « CETA plus » (voir Theresa May : 50 nuances de Brexit).

Avant d’examiner ce que peut viser ce « plus », il convient de voir ce que recouvre le CETA.

Pour rappel, le CETA est l’accord commercial conclu récemment entre l’Union européenne et le Canada (voir CETA : la fin de la politique commerciale commune ? et CETA : incompréhension durable). Il vise principalement à la quasi disparition des tarifs douaniers entre ces deux espaces ainsi qu’une relative harmonisation des règles. L’objectif? A chaque fois, faciliter les échanges et la circulation des marchandises. Pour cela, une juridiction permanente est instituée pour statuer sur les litiges qui pourraient survenir en raison du non-respect par un des Etats de ses engagements.

Ce partenariat d’égal à égal ne peut qu’intéresser les Britanniques. D’une part, il n’emporte aucune obligation financière. D’autre part, il n’emporte aucun contrôle même indirect de la Cour de justice.

Pour autant, il souffre de trois limites que ne peut ignorer actuellement le Royaume-Uni. Tout d’abord, le CETA est un accord mixte ce qui signifie qu’il doit être ratifié par l’UE et par l’ensemble des Etats membres (et parfois de leurs déclinaisons fédérées). A titre d’exemple, la ratification du CETA lancée il y a un an déjà enregistre péniblement 6 Etats.

Ensuite, le CETA n’atteint évidemment pas le niveau d’intégration et d’ouverture du marché intérieur. De même, l’Union douanière offre des avantages plus forts en terme d’intégration économique puisqu’elle fait totalement disparaître les entraves (tarifaires ou non) au niveau des marchandises à l’intérieur, mais oblige en retour à afficher un même tarif vis-à-vis de l’extérieur. Or, pour rappel, les Britanniques souhaitent quitter l’Union douanière tout en en récréant une structure ad hoc qui y ressemble (voir Brexit : que vive Busiris en Europe !).

Par ailleurs, le CETA ne comprend pas les services. Or, ce point est capital pour Londres, notamment pour obtenir le fameux passeport financier (la libre-circulation au niveau des services financiers).

Enfin, le CETA est encore soumis à une épée de Damocles. La CJUE peut encore considérer l’accord contraire au droit de l’Union européenne.

Dans l’hypothèse où ce dernier risque serait levé, à quoi ressemblerait ce « CETA plus » ?

Forcément, Londres demanderait un système proche de l’Union douanière actuelle.  Néanmoins, une telle structure limiterait les possibilités des Britanniques de commercer librement avec le reste du monde.

Au demeurant, le Royaume-Uni ajouterait les services dans le package. Mais, quelle serait l’échange pour que les Européens acceptent ?

Surtout, plus le Royaume-Uni voudra être proche de l’UE sans y appartenir, plus l’oeil de la CJUE se rapprochera. En effet, la Norvège est déjà indirectement sous l’orbite de cette juridiction. Un régime trop intégré pousserait à une situation parallèle.

Enfin, il ne faut pas négliger que le Royaume-Uni souhaite continuer à participer à certaines politiques. Si cela ne relève pas vraiment d’un CETA plus, elles figureront, à n’en pas douter, dans les négociations.

Comme l’avait dit Donald Tusk, président du Conseil européen, « le plus dur, ce n’est pas la séparation, c’est la construction d’une nouvelle relation après la séparation ».


Voir aussi L’après Brexit : la période transitoire (1/2) et Le labyrinthe du Brexit : par où la sortie ?

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