(Statues grecques – British Museum, Londres, 2012)
A l’été 2015, la sortie de la Grèce de la zone €uro suite à un défaut semblait crédible. Combien de Conseils européens de la dernière chance furent alors annoncés ? Combien de fois les négociations furent à deux doigts d’achopper, en raison notamment de la défiance entre les représentants allemands et grecs ?
Néanmoins, les Etats membres et la Grèce trouvèrent un compromis le 13 juillet 2015. C’était peut-être vrai que la Grèce était « trop européenne pour faire faillite ». L’accord permettait la poursuite de l’assistance financière à la Grèce, moyennant de nouvelles réformes jugées indispensables pour un retour à l’équilibre budgétaire.
Ce compromis est depuis entré en vigueur dans l’indifférence générale. De temps en temps, apparaissent seulement dans la presse la nouvelle ligne de crédit accordée à la Grèce ou la prochaine réforme mise en oeuvre par le Parlement grec. La visite de Barack Obama en novembre 2016 aura eu le mérite de rappeler la situation de ce pays.
Comment expliquer cette indifférence ?
Tout d’abord, la Grèce pâtit au niveau européen d’une mauvaise réputation, qui ne lui a jamais permis de bénéficier d’une empathie de la part des autres Etats membres. L’Allemagne, particulièrement, maintient une intransigeance forte : « La Grèce paiera », posture que n’aurait pas reniée la France de Poincaré face à l’Allemagne de l’entre-deux-guerres.
Il faut rappeler que contrairement aux autres Etats qui ont bénéficié d’aides de la part de l’Union, la Grèce est le seul à avoir maquillé ses résultats budgétaires. Il est certes probable que les responsables des autres Etats connaissaient la situation catastrophique des finances publiques grecques. Néanmoins, ce maquillage à bon compte a permis à de nombreux responsables européens de s’indigner quant à la mystification opérée par la Grèce.
Pour ne rien arranger, la Grèce n’a toujours pas renoué pas une croissance durable, contrairement à l’Irlande ou l’Espagne. Or, sans croissance, pas de retour possible à l’équilibre budgétaire pour la Grèce.
Actuellement, le pays est confronté à une dette de 320 milliards d’euros (170% de son PIB), dette en l’état insoutenable – comme le rappelle régulièrement le FMI. Côté recettes, le prélèvement des impôts a longtemps été terriblement lacunaire. Certaines exemptions, comme celle accordée à l’Eglise orthodoxe, ne semblent plus possible dans un tel contexte.
Pour autant, les Européens doivent admettre aussi qu’une restructuration de la dette est nécessaire. A cet égard, J. E. Stiglitz propose une solution originale : indexer le remboursement grec sur sa croissance. Plus la croissance grecque est importante, plus les remboursements de la dette seront élevés. Une forme d’accord gagnant-gagnant pour toutes les parties.
Or, l’arrivée de nouvelles problématiques au niveau européen a relégué le problème grec au second plan.
D’une part, l’hypothèse du Grexit a été remplacée par la réalité du Brexit, bouleversant les scénarios initialement conçus. Le déclenchement de la procédure de retrait par le Royaume-Uni devrait encore plus éloigner des radars médiatiques le cas grec. Après tout, en raison de leur poids économique respectif, le départ du Royaume-Uni de l’Union européenne est aujourd’hui plus sensible que celui de la Grèce de la zone euro.
D’autre part, l’arrivée massive de réfugiés fuyant la guerre ou la famine a davantage conduit les Européens au repli sur soi qu’à l’entraide pour faire face à ce défi. A cet égard, une double peine touche la Grèce : déjà essorée par plusieurs années de réformes, là voilà qui se retrouve confrontée à des réfugiés qu’elle n’est pas en capacité d’accueillir. La répartition des réfugiés est évidemment un absolu indispensable pour aider la Grèce. Parallèlement, l’Europe ne peut faire l’impasse sur la création de centres européens d’asile et de gardes frontières européens, seuls remèdes à moyen terme pour la crise humanitaire que traverse la Grèce, et dans une moindre mesure, l’Italie. Or, sur ce sujet, l’Europe n’a pas su être à la hauteur de ses valeurs (voir Aylan : le naufrage des valeurs européennes).
La Grèce est loin d’être tirée d’affaire et le chemin vers la croissance et l’équilibre sera long. Le pire est sûrement que désormais, les épreuves grecques sont passées sous silence, sans que soit avancée une véritable solution de sortie de crise.
PS : La tragédie grecque a inspiré une pièce de théâtre. A retrouver ici : Unis dans l’adversité – Acte I.
Sur des sujets voisins : La fin du Pacte de Stabilité : le début d’une nouvelle ère ? et L’euro, à quel prix ?.
Mon avis sur la question de l’abandon de la dette grecque: non.
Pourquoi:
– Seul argument en sa faveur la dette grecque est insoutenable. Dans ce cas ils feront défaut fin de l’histoire.
– Si on annule la dette grecque les créanciers, c’est à dire les états européens (nous) vont devoir assumer cette charge. Je n’ai pas de problème à payer mes factures mais je ne paye pas celles de mon voisin.
– Les grecs ont maquillés leurs comptes puis une fois découvert nous ont pris pour des imbéciles pendant des années. On ne peut pas récompenser ce comportement, surtout à nos dépens.
J’entends bien qu’annuler la dette grecque est une bonne chose pour les grecques mais c’est une mauvaise chose pour les autres pays européens. Les grecques ont dépensé l’argent, leur gestion a été laxiste et malgré ça l’europe les a aidés.
Nous avons été plus que généreux et nous avons d’autres problèmes auxquels consacrer notre argent.
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La seule raison pour laquelle la Grèce avait fait les gros titres est la fanfaronnade de Tsipras menaçant de refuser le plan de redressement négocié avec l’UE, le tout appuyé par un vrai-faux référendum. Ce qui aurait abouti mécaniquement à un Grexit, événement effectivement hautement symbolique (le Brexit n’avait pas encore eu lieu). Heureusement, ou malheureusement, on a pu constater que Tsipras n’était qu’un Tartarin. Confronté aux conséquences bien réelles d’une sortie de l’Europe – la Grèce serait devenue un pays du tiers-monde – il a prestement mangé son chapeau et baissé son pantalon, et avalé sans rechigner son remède de cheval à la sauce allemande. Dans ces conditions, il n’y a en effet plus de raison particulière pour que la Grèce reste sous les feux de l’actualité. Chacun sait très bien que leur cas est sans espoir, et qu’ils vont rester sous perfusion européenne (avec notre argent) pour les décennies qui viennent.
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