(Chemin de croix de Smlednik, Slovénie – 2010)
Il y a dans les rapports entre Theresa May, l’actuelle Premier ministre britannique et le Brexit quelque chose des liens entre le Capitaine Haddock et le sparadrap. Elle a beau tâcher de s’en défaire, il ne cesse de s’accrocher à elle. Pourtant, lors de la campagne précédant le référendum de juin 2015, Theresa May s’était plutôt illustrée comme partisane – discrète certes – du maintien du Royaume-Uni dans l’Union européenne.
Néanmoins, suite à l’autodestruction de Boris Johnson et au départ de Nigel Farage, c’est à elle qu’est revenue la tâche d’enclencher le Brexit et d’organiser le futur du Royaume-Uni sans l’Europe. C’est son nom qui sera associé à ce départ. Encore, restait-il à l’organiser…
Faute de moyens humains adéquats, pour négocier d’abord, pour assumer les nouvelles compétences ensuite, Theresa May avait temporisé au début de son mandat. Elle avait rappelé que c’était au Royaume-Uni de choisir le moment propice du retrait. Elle pensait alors à fin 2017, fenêtre opportune pour laisser passer les élections françaises et allemandes.
Finalement, son attentisme a été attaqué de part et d’autre, par les Brexiters et les Européens. Les uns craignaient de voir le soufflé du Brexit retomber, les autres refusaient une incertitude durable, néfaste à l’Union.
Il fallait alors lever le voile sur les prévisions du Royaume-Uni. En effet, contrairement à l’expérience de Schrödinger dont le chat peut être, dans sa boîte, à la fois mort et vivant, l’économie ne supportait pas la superposition de deux états totalement contradictoires : un Royaume-Uni à la fois en dehors de l’Union et à l’intérieur. Theresa May trancha donc pour activer l’article 50 dès le début de 2017.
Cela semblait judicieux car plus le temps passe, plus le Brexit vire à la farce. Il y eut d’abord la note secrète diffusée par la presse révèlant que le Royaume-Uni souhaitait obtenir « le beurre et l’argent du beurre ». Il y eut ensuite la démission surprise de l’ambassadeur britannique auprès de l’Union européenne, lassé de ses atermoiements.
Seulement, la décision ne plaît pas à tous. L’Ecosse, profitant d’une population majoritairement favorable à l’Europe, décide de rouvrir le chantier de l’indépendance, estimant que le contrat du maintien de 2014 était rompu.
Plus récemment, la High Court est venue ajouter une épine dans le pied de Theresa May. Pour la Cour, le Parlement doit se prononcer sur le Brexit, avant que le Gouvernement puisse lancer la procédure de retrait. Derrière les débats « constitutionnels », la juridiction vient rappeler deux choses. D’une part, le référendum du 23 juin était consultatif. D’autre part, au Royaume-Uni, la souveraineté n’appartient pas au peuple mais au Parlement.
Résultat, un Parlement orienté en faveur du maintien des liens avec l’Union va devoir se prononcer sur le Brexit. Se contentera-t-il d’être une simple chambre d’enregistrement du vote populaire ? Ou, sera-t-il le lieu d’un deuxième round au débat Brexit/Bremain ? La Premier ministre court le risque alors de voir sa majorité réunie autour d’elle se fragmenter à nouveau sur un sujet aussi épineux.
Les Brexiters voulaient redonner du pouvoir à leur Parlement ; c’est fait. En attendant, pour Theresa May, le chemin de croix jusqu’au Brexit est parti pour durer.
Voir aussi Theresa May : 50 nuances de Brexit, Brexit ou l’impossible unité ? ou Démission de Theresa May: tout a une fin, sauf le Brexit.
Voir les derniers soubresauts du Brexit :
¤ Le Brexit, c’est maintenant ?
¤ Brexit : les enjeux (Volume 2)
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