(Chinatown, Londres, 2013)
La Révolution culturelle a passé, en 2016, le cap de la cinquantième année. Cette date symbolique offre l’occasion de revenir sur les soubassements de la puissance chinoise, et ses limites.
L’analyse de la Chine en France est particulièrement marquée par l’ouvrage rédigé par A. Peyrefitte Quand la Chine s’éveillera, le monde tremblera, conçu admirablement après seulement deux semaines d’exploration du pays.
Pour résumer le propos de ce livre, l’auteur y expose l’avènement de la puissance chinoise, susceptible de bouleverser le monde.
Cet ouvrage a rencontré un certain écho, au fur et à mesure de l’émergence de la Chine sur la scène internationale.
D’emblée, il convient de tempérer son succès. La thèse du livre a certes été appuyée par l’importance prise par la Chine. Mais, les postulats de l’auteur pour justifier l’avènement de ce pays se sont pour la plupart avérés faux. A cet égard, il s’est retrouvé dans la même situation que H. Carrère d’Encausse qui avait pronostiqué avec succès la chute de l’URSS, en avançant de mauvaises raisons.
D’ailleurs, l’analyse d’Alain Peyrefitte n’est pas dénuée d’ambiguïté. En effet, cet homme, attaché à l’ordre, laisse plusieurs fois transparaître son admiration pour le modèle chinois, qui reste – surtout à cette époque – une des pires dictatures, et pour la docilité de ses habitants, docilité à l’en croire ancrée – de manière presque génétique – dans cette population. « Il faut arriver à ce que les intellectuels soient heureux de ne plus l’être. » « Si nos élites savaient aussi bien trouver un langage qui plaise au peuple, au lieu de s’enfermer dans le ghetto de leur ésotérisme, si les adultes avaient l’imagination et le talent d’entraîner les jeunes En peuplant leurs songes, la civilisation d ‘Occident serait peut-être moins incertaine d’elle-même. »
Or, il semble aujourd’hui que le monde se soit trop focalisé sur l’émergence de la Chine, la considérant depuis déjà une décennie comme la première puissance de demain.
Pourtant, le marasme économique du Japon devrait amener à réfléchir sur le devenir de la Chine, alors qu’il était considéré au détour des années 1980 comme le principal concurrent aux Etats-Unis et devait même les dépasser.
A cet égard, les secousses financières engendrées par la Chine en août 2015 et en janvier 2016 ont révélé à la face du monde les premiers écueils de son modèle.
Il est certes évident que la Chine est amenée à représenter une puissance majeure de la planète, bien plus que ne l’a jamais été le Japon. Toutefois, elle n’atteindra jamais l’hégémonie acquise par les Etats-Unis.
En effet, d’une part, la Chine est entourée de puissances hostiles à son émergence. Alors que les Etats-Unis ont pu prospérer sans véritable opposition à proximité de leurs frontières et ont bénéficié de l’autodestruction de l’Europe, la Chine est en tension régulière avec ses proches voisins (le Japon, encore 3e puissance économique mondiale, la Thaïlande, la Russie, …) et des pays plus éloignés (l’Inde, 2e démographie ; les Etats-Unis justement)
D’autre part, la Chine connaît de nombreuses faiblesses structurelles, qui vont freiner sa croissance, voire même provoquer une ou plusieurs crises. Il y a bien sûr ses faiblesses économiques (endettement excessif des collectivités, économie sous perfusion étatique). Mais, il y a aussi ses problématiques démographiques (vieillissement croissant, surreprésentation masculine, …) qui sont autant de bombes à retardement pour la suite.
A ces premières causes, il faut ajouter une cause déterminante de l’effondrement de l’URSS : la Chine n’est pas une démocratie. Cet état, apparemment anodin, est pourtant rédhibitoire pour accéder durablement au statut de puissance mondiale. Bien sûr, comme le montre l’exemple de l’URSS, on peut être une puissance immense durant plusieurs années. Mais, la volonté de puissance nécessite toujours une éducation développée et des échanges avec l’extérieur qui finissent par entrer en contradiction avec le régime en place. Or, la démocratisation est rarement un processus sans heurts et provoque souvent des crises intermédiaires.
La Chine est actuellement une bulle de puissance en expansion, qui menace à tout moment d’éclater. Il n’appartient qu’au reste du monde de voir ses fragilités.
Voir aussi BRICS : concept théorique ou réalité géopolitique ?
Intéressé(e) par la politique internationale ? Vous pouvez trouver des articles sur la Russie, la Turquie, etc… : ici.
Quand on regard la situation économique de la France et sa gouvernance politique depuis 2 décennies, il est permis de douter du lien entre la démocratie et le statut durable de puissance mondiale.
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