(Retour de la cavalerie, Londres – 2012)
(Mis à jour au 3/11/2016)
Les Britanniques ont décidé de se retirer depuis plusieurs mois déjà. Pourtant, le Royaume-Uni est encore solidement amarré au continent européen.
Dès lors, se réjouir comme certains responsables à l’extrême-droite de la bonne santé économique anglaise n’a pas vraiment de sens, puisque ce pays est encore membre de l’Union européenne. C’est d’ailleurs pour cette raison qu’il existe un tel écart entre les prévisions économiques pessimistes des instituts et l’état financier actuel du pays.
Mais justement, où en est le Brexit ?
Force est de constater que les négociations n’ont toujours pas commencé ; la procédure de retrait prévue à l’article 50 TUE n’ayant toujours pas été activée.
Finalement, Theresa May (Première ministre anglaise) a pris les devants des pronostics et a annoncé le lancement de la procédure avant mars 2017.
Ce choix peut sembler étonnant à la fois d’un point de vue stratégique et pragmatique.
Stratégique car les négociations commenceront directement au cours des élections présidentielles/législatives françaises et se prolongeront pendant les élections législatives allemandes de 2017.
Pragmatique car le Royaume-Uni manque encore des moyens humains pour organiser le retrait de l’Union et remplacer peu à peu les dispositifs européens par des instruments nationaux.
Les longues hésitations qui ont précédé ce choix sont en tout cas révélatrice de l’impréparation complète des Britanniques à prévoir un tant soit peu l’éventualité d’un départ. A cet égard, la décision du 3 novembre de la High Court vient compliquer l’idée d’un départ ordonné. Cette décision s’inscrit dans une jurisprudence « constitutionnelle » constante de ce pays, puisque le seul détenteur de la souveraineté britannique est le Parlement. Résultat, un Parlement en faveur des liens avec le continent va devoir confirmer une population s’étant prononcée contre.
Ceux qui ont pensé que le Brexit voté, le Royaume-Uni ne serait rapidement plus membre de l’Union européenne en seront pour leurs frais.
Au demeurant, les deux ans de délai prévus pour la négociation ne seront pas de trop pour permettre d’élaborer un accord qui satisfasse l’ensemble des parties prenantes, c’est-à-dire à la fois le Royaume-Uni, l’Union européenne, mais aussi les autres Etats membres.
Or, d’autres échéances pourraient se télescoper avec la volonté britannique de se retirer en bon ordre en 2019.
En 2019, les élections européennes auront lieu. Elles pourraient notamment avoir pour enjeu l’acceptation par les autres Etats de l’accord de sortie du Royaume-Uni.
Un an après, ce sera au tour des Britanniques d’élire leur nouveau Parlement. Qu’arrivera-t-il si les proeuropéens arrivaient en tête ?
Evidemment, le scénario d’une activation en 2017 suppose que les responsables britanniques aient une quelconque idée du régime d’association qu’ils veulent pour leur pays avec l’Union.
Si certains comme Boris Johnson veulent rompre tout lien avec l’Union, il est probable que c’est la ligne modérée, c’est-à-dire celle de relations proches avec l’Union, qui l’emportera au sein des Tories.
Une fois trouvé, l’accord de sortie devra être ratifié par référendum – avec en plus le risque d’un revirement de la population – ou par le Parlement. Dans les deux cas, seule une ligne modérée semble à même de parvenir à une majorité sur un sujet aussi sensible.
Cette ligne modéré devra certainement déterminer le futur statut du Royaume-Uni, hors des régimes suisse, norvégien ou turc.
La Fondation Bruegel a proposé quelques pistes intéressantes, pistes que certains Britanniques sont pour l’heure incapables d’entendre, engoncés dans la certitude de trouver leur salut hors de l’Union, ou pire un futur avec l’Union mais sans en appliquer les règles et participer à son budget.
En effet, quelque soit le futur lien de rattachement entre les Britanniques et l’Union, ceux-ci n’échapperont pas à ces deux obligations.
Dès lors, il n’est pas certain que même avec un temps infini, les Britanniques et les Européens parviennent à trouver un compromis acceptable de sortie.
L’Europe sort à peine d’un périple de plusieurs années sur la Grèce et risque bien de se retrouver embarquer dans une longue aventure avec le Royaume-Uni.
Sur ce thème, voir aussi le dossier consacré au Brexit ici.
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