(Retour de cavaliers, Londres – 2012)
[Actualisé au 27/08/2016]
Le Brexit à peine voté, les problèmes s’accumulent sur la sortie du Royaume-Uni. Ceux qui ont pensé que le Brexit voté, le Royaume-Uni ne serait rapidement plus membre de l’Union européenne en seront pour leurs frais.
Certes, les représentants des Etats membres avaient travaillé le week-end du 24/26 juin sur le Brexit afin d’aborder une ligne de conduite commune pour le Conseil européen suivant. L’Europe sort à peine d’un périple de plusieurs années sur la Grèce et n’a absolument aucune envie de faire de même avec le Royaume-Uni.
Le Conseil européen a d’ailleurs rapidement désigné la personne en charge des négociations pour l’Union européenne, un Belge. En choisissant un directeur de chez lui, le Conseil européen semble vouloir écarter la Commission européenne. Faut-il voir dans cet isolement la volonté de privilégier la défense des intérêts des Etats membres plutôt que la préservation de l’intérêt de l’Union ? Car, on le rappelle, c’est à la Commission européenne qu’il revient de représenter et défendre l’intérêt de l’Union.
Evidemment, avec quelques jours de retard, la Commission a aussi désigné son représentant qui n’est autre que le Français Michel Barnier. Pour la coordination entre institutions européennes et une représentation commune, on repassera.
Dans tous les cas, cet activisme de l’Union européenne est d’autant plus visible que le Royaume-Uni a adopté une attitude très attentiste. Même si finalement, David Cameron, premier ministre a démissionné plus vite que prévu, laissant place à Theresa May. Celle-ci refuse d’activer directement l’article 50 avant 2017. Personne ne semble presser de reprendre le pistolet encore chaud par lequel David Cameron a tiré une balle au pied de son pays.
Le Royaume-Uni chercherait-il à gagner du temps ? Veut-il réfléchir aux différentes options avant de lancer le processus ? Tient-il à associer en amont des représentants écossais ? Bien que consultatif, il ne fait pas de doute que le Royaume-Uni demandera à sortir. Néanmoins, une fois, l’article 50 activé, le Royaume-Uni aurait deux ans pour trouver un compromis avec le Conseil européen et le Parlement européen. Sinon, passé ce délai et faute d’accord du Conseil européen pour le prolonger, il se trouverait automatiquement exclu de l’ensemble des politiques.
Or, contrairement aux fantasmes des partis extrêmistes, le Royaume-Uni n’a aucune intention de couper toutes ses amarres avec le continent européen.
Déjà, parce que même si certains le prônent, on ne peut sortir du jour au lendemain d’une organisation comme l’Union européenne. De milliers de règles doivent être remplacées par des règles internes (une norme ne vaut-elle pas mieux que 28 ?), des frontières – au moins tarifaires – doivent être rétablies, des accords internationaux deviennent caduques. Les risques pour la sécurité juridique sont excessifs pour ne plus appliquer l’acquis communautaire du jour au lendemain.
Ensuite, parce que les Britanniques sont attachés au marché intérieur. Pour preuve, Nigel Farage, sans aucune gêne, demande déjà à en bénéficier de l’Union européenne gratuitement.
Heureusement, beaucoup de responsables politiques européens ne sont pas prêts à permettre une participation à si bon compte.
La principale question des négociations tournera autour du prix pour rester dans le marché intérieur – le premier au monde.
Et c’est bien sur ce point que certains Britanniques qui ont opté pour le Brexit risquent de se sentir quelque peu lesés, pendant que les eurosceptiques crieront au complot.
Quel que soit le régime qui lui sera applicable (le régime norvégien, suisse ou un autre), il devra accepter deux choses qui lui faisaient pourtant horreurs et ont justifié une bonne partie des « non » récoltés :
– appliquer des règles de l’Union ;
– contribuer au budget de l’Union.
Pire, sur ces deux choses, le Royaume-Uni perdra toute influence puisqu’il n’est plus membre et ne peut donc plus voter ni s’opposer aux règles édictées par l’Union, au budget mis en oeuvre par l’Union.
Pour un Royaume-Uni qui devait en sortant de l’Union retrouver sa souveraineté (sic), c’est un drôle de paradoxe, non ?
Il n’est d’ailleurs pas exclu que la situation devienne plus cocasse encore. En effet, le Royaume-Uni procèdera certainement à un examen des politiques qui pourraient l’intéresser. Le résultat d’un tel examen pourrait être édifiant, mais pas dans le sens voulu par les Britanniques.
En effet, il existe un précédent savoureux. David Cameron avait commandé une étude pour réévaluer à la baisse la participation du Royaume-Uni dans le domaine de la Justice et des Affaires intérieures. L’étude s’était conclue sur le besoin pour le Royaume-Uni de rejoindre davantage de politiques européennes.
Un tel examen devra aussi tenir compte des possibles velleités écossaises et des éventuelles revendications nord-irlandaise. En effet, ces deux nations pourraient chercher à négocier leur maintien dans le Royaume-Uni en échange d’une acceptation large par celui-ci des politiques européennes.
Ainsi, la procédure de divorce déjà prévue pour être longue sera nécessairement retardée par les altermoiements britanniques.
A cela, il faut ajouter les possibilités de nouvelles élections au Royaume-Uni qui pourraient bouleverser l’organisation par les Britanniques de leur départ. Qu’arriverait-il si un candidat militant pour le maintien arrivait en tête ?
Après, d’un point de vue européen, il est à espérer que ce temps supplémentaire permette une meilleure préparation des institutions européennes à l’organisation d’un Brexit afin d’être en position de force dans ces négociations.
Car, selon le temps que durent ces négociations, il est fort possible que la position du Conseil européen se modifie au cours des possibles alternances dans les différents Etats membres.
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